Il est resté le "Gone" toujours ravi de donner des nouvelles aux Caladois et au Beaujolais, la terre où il a grandi au jeu, au football, avant d'aller mûrir à l'Olympique Lyonnais, pour en devenir ce milieu et capitaine respecté, et filer à l'étranger – l'Italie à Rome, l'Espagne à Séville –, nourrir sa carrière d'autres choses, de défis qui l'ont installé aujourd'hui à Grenade, dans ce sud-est de l'Andalousie devenu son fief depuis trois saisons. Maxime Gonalons, est l'archétype du footballeur qui ne change pas au fil des années, même si lui se dit "vieux" (il aura 33 ans en mars), il conserve une réelle fraîcheur dans un milieu qui en manque tellement. Cette semaine, dans une Liga où les journées s'enchaînent comme on s'enfile les "tests" PCR ici, il est revenu sur son quotidien et celui du foot espagnol et européen, sans oublier de faire un petit crochet en Calade où il garde un œil sur les productions du FCVB toujours bien placé en National, tout en rêvant d'une possible accession en Ligue 2. Avec le retour de Gonalons dans le Beaujolais, après avoir été parrain du club ? Il murmure ici cette possibilité de fin de carrière. Ce serait une belle manière de boucler son parcours. En Calade...
Comment se déroule la vie du foot en Espagne, en ce moment ? Est-ce aussi compliqué qu'en France ?
"Non, ça joue encore. On en est à 75 % de présence du public pour les jauges dans les stades. Ce qui est bien ici, c'est que les matches ne sont pas reportés. Le règlement indique qu'il faut cinq joueurs pros plus un gardien disponibles pour jouer, sinon tu perds le match. Après ça, tu te débrouilles, tu vas chercher des joueurs en réserve s'il le faut, mais tu joues."
Cinq joueurs pros disponibles ? C'est assez limité comme critère…
"C'est ce qui nous est arrivé l'année dernière à la Real Sociedad, un scandale ! (NDRL : le 8 novembre 2020, la Fédération espagnole de football avait refusé le report de ce match malgré l'épidémie de coronavirus qui avait empêché la majeure partie de l'équipe andalouse de faire le déplacement à San-Sébastien)."
Ce qui se passe en France, ces jauges à 5 000 personnes, ça vous choque ?
"On va mettre 5 000 personnes dans un stade, dans une ville comme Brest par exemple et 5 000 dans un stade à Lyon. Franchement, ce n'est pas compréhensible. En Espagne, le virus commence à être perçu comme la grippe. Il arrive un moment où les gens ont besoin d'aller travailler sinon le pays s'écroule."
Le football avec toutes ces contraintes, ça se passe comment dans une équipe comme la vôtre à Grenade ?
"On est testés tous les jours, ça n'en finit plus. On t'explique qu'il fallait te faire vacciner alors que beaucoup ne voulaient pas, et après on te dit que l'on va recommencer les tests, tout le temps, ça use."
C'est une situation qui vous éloigne du plaisir du foot ?
"C'est surtout que tous les matins tu peux arriver à l'entraînement et on peut te dire de rentrer chez toi, après un test. Tu sais jamais. Mais ce qui a été compliqué, c'était la période sans personne dans les stades lors de la première vague du Covid. On arrivait, le jour du match, une demi-heure avant dans le stade en étant déjà changé et tu retournais te doucher à l'hôtel. Tu peux imaginer le protocole… Ce n'était pas la meilleure des préparations. Elle était tronquée. C'était du n'importe-quoi !"
"Je n'aurais jamais imaginé que je resterais trois ans à Grenade"

Vous en êtes à votre troisième saison à Grenade. C'était dans vos plans de départ ?
"Je ne l'aurais jamais imaginé. Cette saison, on n'a pas très bien démarré (NDRL : trois nuls et deux défaites lors des cinq premières journées de la Liga). Il y a eu beaucoup de changements dans le staff technique mais maintenant ça va beaucoup mieux. On remonte au classement avant deux rendez-vous importants cette semaine (NDRL : Grenade était 14ème avant d'affronter Getafe ce jeudi et Osasuna dimanche). Si on gagne, on aura bien avancé pour le maintien. Dans l'histoire récente du club, ils ont longtemps été en 2ème division ou 3ème division. C'est notre troisième saison où l'on enchaîne record sur record. On a écrit l'histoire de ce club, chaque année."
Qu'est-ce qui fait l'âme de votre équipe ?
"Il y une ossature dans ce club de joueurs là depuis un bon moment. On est une équipe "chiante" à jouer, difficile à bouger. On a retrouvé ça depuis quelques journées. Même si ce n'est pas toujours flamboyant, on a gardé la dynamique que nous avions avec l'ancien entraîneur, Diego Martinez."
Quelle est la philosophie de jeu du nouveau coach de Grenade cette saison, Robert Moreno ?
"C'est un entraîneur qui aime avoir le ballon. Au début, cela a eu du mal à prendre, donc on est revenus aux bases. On essaie aujourd'hui de faire un mix des deux façons de jouer."
Il vous demande quoi, à vous, en particulier ?
"Ressortir les ballons de derrière. C'est ce que j'ai connu à Lyon. Il faut que l'on progresse dans la possession pour avoir des moments plus tranquilles. Souvent on a tendance à balancer. On doit arriver à plus de maîtrise mais c'est toujours pareil, ça vient avec la confiance et les résultats."
Sans nécessairement opérer en bloc bas ?
"On ne l'a jamais été. On veut être plus dans la possession du ballon que d'attendre l'adversaire."
Vous êtes le seul français du groupe à majorité hispanique, ça se vit bien ?
"Les deux premières saisons j'étais avec Dimitri Foulquier qui a été transféré à Valence. Mais je ne ressens aucune solitude ici. C'est ma troisième saison au club, je connais bien les dirigeants, le club."
C'est devenu votre maison…
"Pas ma maison mais j'ai mes repères."
"Messi à Paris, ça reste un magicien. Il doit digérer son départ du Barça pour la Ligue 1, un championnat beaucoup plus physique"

Cette saison vous avez réussi à tenir en échec le Barça (1-1), ça reste de bons résultats quand on vise le maintien...
"On les avait battus chez eux aussi l'an dernier (1-2). Mais les matches de Liga, de façon générale, il y a beaucoup d'équipes belles à voir jouer. C'est un championnat moins physique que la France, moins tactique que l'Italie. Mais c'est régalade, souvent ! A l'entraînement, c'est ballon et encore ballon. La première chose que tu fais quand t'arrives sur le terrain, c'est toro ! Le physique se fait avec le ballon, aussi. C'est ce que j'ai connu à Lyon même si on faisait beaucoup de physique, parfois sans ballon."
Quand cet été, la star de la Liga, Messi, a quitté le Barça pour le PSG, cela a été perçu comment chez les joueurs ?
"C'était incroyable ! Comme une affaire d'état ! Mais en France, c'était aussi la même chose (rires). Il n'y a pas un mec qui pouvait penser qu'un jour Messi jouerait en Ligue 1. En Espagne, c'était impensable de voir Messi quitter le Barça. Lui aussi voulait d'ailleurs rester à Barcelone."
Comment on se prépare à affronter un joueur pareil quand il était votre adversaire ?
"Ah mais ça ne me fait pas peur ce genre de joueur ! (rires)"
On imagine bien ! (rires)…
"Plus sérieusement, je connais bien Miralem Pjanić (NDRL : son ancien coéquipier à Lyon) qui techniquement est très fort aussi. Le plus difficile face à ces joueurs c'est de les empêcher de faire les passes qui tuent ton équipe. Messi, sur ces trois dernières saisons a fait évoluer son jeu. Mais sa dernière passe, ça faisait souvent la différence. Il fallait éviter de le mettre dans ces dispositions. Contre lui, la vraie difficulté, ce sont les moments où on ne le voit, c'est là où il est le plus dangereux. Il a des stats de 5 à 6 km par match pendant que toi t'en est à 12, le gars quand il a le ballon, je peux te dire qu'il est frais ! (rires). Il sait toujours se placer dans les zones où tu ne vas pas être bien. C'est un magicien."
Le voir en difficultés en Ligue 1, vous vous y attendiez ?
"C'est normal parce qu'il faut gérer des choses nouvelles pour lui. D'abord la langue même si à Paris il y a beaucoup de joueurs qui parlent espagnol, le jeu. Ensuite, il faut changer parce que la Ligue 1 ça reste un championnat beaucoup plus physique. Et puis surtout, il doit digérer le fait d'avoir quitté le Barça, parce que ce n'est pas ce qu'il voulait. Est-ce que c'est le meilleur joueur de tous les temps ? Je ne sais pas. Mais avant de voir un joueur avec ce talent, il va s'en écouler du temps !"
Le débat sur son Ballon d'Or, est-il légitime ?
"Si Karim (Benzema) fait des choses exceptionnelles, c'est surtout Lewandowski qui a accompli une saison de dingue. Messi a quand même eu des stats avec le Barça qu'il a porté haut. Il a presque gagné la Copa América avec l'Argentine à lui tout seul. Ce n'est pas non plus un scandale de le voir gagner le Ballon d'Or même si Lewandowski le méritait."
"À l'AS Rome, j'avais quand même devant moi le capitaine de l'équipe (Daniele De Rossi). Je savais que ce serait très compliqué…"

Le niveau actuel de Benzema, un lyonnais comme vous, ça vous évoque quoi ?
"C'est incroyable. Il est un peu comme le bon vin, plus il vieillit, meilleur il est. Il sait tout faire. Il a pris conscience depuis le départ de Cristiano Ronaldo que c'était lui le Boss du Real. Il assume. Il a changé physiquement. C'est une machine."
Son retour en Equipe de France vous réjouit-il ?
"Comme tout le monde. Les cinq années qu'il a passées sans jouer pour la France, c'était quand même triste. Il y a quelque chose qui ne collait pas."
Vous avez connu 8 sélections en Equipe de France. C'est un regret de ne pas en avoir connu davantage ?
"J'ai toujours essayé de donner le maximum quand j'y étais mais il y a du monde ! Le regret que je peux avoir c'est de ne pas avoir fait d'Euro ni de Coupe du Monde. Sinon, je ne vis pas avec des regrets parce qu'il y a pire dans la vie."
Vos expérience d'une saison à l'AS Rome (2017-2018) et à Séville (2018-2019) vous en gardez en quoi ? Ce sont des échecs pour vous ?
"Je n'aime pas parler d'échec. À Rome, j'avais quand même devant moi le capitaine de l'équipe (Daniele De Rossi). Je savais que ce serait très compliqué. Je sortais de 17 années à Lyon, ça se finit pas forcément bien. J'ai mis du temps à le digérer. Et puis tu rentres dans un nouvel environnement, avec une nouvelle langue, une nouvelle culture, un nouveau style de jeu. J'ai beaucoup appris en Italie. On avait fini troisième de la Série A, avec une demi-finale de la Ligue des Champions. C'était une belle expérience. À Séville, où j'ai été ensuite prêté, j'ai passé presque toute ma saison en étant blessé (NDRL : fracture du péroné de la jambe droite). C'était l'année la plus galère de ma carrière. Ce qui est dommage c'est que j'étais dans un club qui brillait en Europa Ligue. La ville était magnifique, le stade aussi. J'ai pas pu montrer mon football là-bas."
"À l'Olympique Lyonnais (OL), j'ai adoré travailler avec Rémi Garde et Bruno Génésio"

Qui aura été le coach le plus marquant durant toutes ces saisons ?
"Ils ont tous leurs caractéristiques mais à Lyon j'ai adoré Rémi Garde et Bruno Génésio. Ils avaient la même vision du foot. À Grenade, ensuite, mes deux premières saisons ont été marquées par l'entraîneur Diego Martinez. Il savait tout faire. Humainement ou au niveau du jeu, c'était fantastique. Tout le monde l'aimait : ceux qui jouaient, ceux qui étaient blessés. C'est bon signe."
Parmi vos anciens coéquipiers lyonnais, est-ce que vous êtes surpris par ce que fait Fekir en ce moment au Betis Séville ?
"Il est comme il était à Lyon : il fait mal. Il régale le foot espagnol aujourd'hui. Beaucoup de joueurs, ne comprennent pas ce qu'il fait là-bas."
Vous avez été capitaine de l'Olympique Lyonnais. La saison qu'ils vivent, ça vous touche ?
"Ce n'est pas que cette saison. Ils ont une équipe qui tient la route, pourtant. Je ne comprends pas tout. Ils font des bonnes premières mi-temps puis après il n'y a plus rien. Pourtant, j'aime la façon de voir le football de l'entraîneur (Peter Bosz). Il n'a pas peur de dire les choses. L'OL ne peut pas être 10ème du championnat aujourd'hui pour moi. J'aimerais les voir plus haut. On ne peut pas tout réussir dans le foot mais on doit au moins tout donner, s'arracher. Avec le talent qu'il y a dans cette équipe, si tout le monde court en même temps, peu d'équipes peuvent les battre."
Et Aulas, vous en pensez quoi à l'heure où il est très critiqué ?
"Je ne pourrais pas en dire du mal. C'est impossible. Ce qu'il a fait pour le club, tu ne peux pas l'effacer comme ça. C'est le plus grand président de club en France de ces trente dernières années. J'ai le plus grand respect pour lui. Les gens peuvent le remercier. L'OL sans lui, ce ne serait pas l'OL d'aujourd'hui."
Vous étiez le capitaine de l'Olympique Lyonnais le jour du premier match du club au Groupama Stadium le 9 janvier contre Troyes (4-1). C'est une date importante pour vous ?
"On ne pourra pas me l'enlever ! C'est une partie de mon histoire avec Lyon."
On parle, à chaque mercato de votre retour en France, ça finira par arriver ?
"On fermera la boucle en France, sûrement."
"Finir au FCVB ? Pourquoi pas, mais en Ligue 2…"

Vous suivez toujours le FCVB, le club de vos débuts et dont vous êtes le parrain ?
"Bien-sûr ! Il vous qu'ils s'accrochent aux premières places en National !"
Vous vous voyez finir en Calade ?
"Si ça monte en Ligue 2 pourquoi pas ! (rires)"
Il est au courant le président (Philippe Terrier) ?
"Je lui ai dit que tant qu'ils ne seront pas en Ligue 2, je ne viendrais pas ! (rires)".
Vous avez suivi leurs barrages pour la Ligue 2 l'an passé ?
"J'étais dégoûté pour eux. Je pense que cela a été peut-être un mal pour un bien. Tu passes des étapes et peut-être que cette année ça va être la bonne. C'est cohérent ce qu'ils produisent. Je regarde leurs matches depuis l'Espagne, toujours. Collectivement, ils sont vraiment costauds."
Ralph NEPLAZ
Correspondant local de presse.